En visite en Afrique de l'ouest, Zoellick réitère les positions américaines sur le coton et rappelle les avantages de l'AGOA et du MCA

 

 

Le ministre américain chargé des négociations commerciales multilatérales, Monsieur Robert Zoellick, a effectué une visite de travail du 7 au 10 décembre 2004 dans trois pays de l'Afrique de l'ouest : le Mali, le Bénin et le Sénégal. Cette visite est la concrétisation d'une promesse déjà formulée à l'endroit de ces pays de l'Afrique de l'ouest, il y'a quelques mois à Genève par le représentant américain. 

 

Au cours de son séjour à Dakar, il a rencontré des parlementaires, des agriculteurs et des chefs d'entreprise lors d'une réunion qu'il a co-présidée avec le ministres de l'Agriculture et celui du commerce ; respectivement Messieurs Habib Sy et Mamadou Diop Decroix. La réunion a donné lieu à un point de presse au cours duquel il a abordé plusieurs question-clés en discussion dans le cadre des négociations commerciales multilatérales. 

 

Il est ainsi revenu sur la lancinante question du coton, le Millenium Challenge Account (MCA) et sur l'AGOA. 

 

Parlant de la question du coton, Zoellick a considéré que le coton, contrairement aux revendications des pays africains producteurs, ne peut être traité de façon spécifique à 1' OMC dans la mesure où « il y'a des pays qui sont intéressés par le coton, d'autres par le soja et des biens de service. Donc l'Afrique ne peut pas sortir le coton du lot, il faut qu'elle fasse des négociations d'ensemble «. Selon lui, eu égard au nombre pléthorique des produits à prendre en considération par l'Organisation Mondiale du Commerce, c'est presque une utopie de vouloir traiter de manière spécifique le problème du coton par rapport aux négociations agricoles. Il a cependant salué les avancées connues dans le traitement de ce dossier avec la mise en place récente du sous-comité du coton au niveau de l'OMC . 

 

Abordant le Millenium Challenge Account, le représentant américain, tout en mettant en exergue les perspectives intéressantes de cette initiative américaine, note que : « ...pour une utilisation judicieuse de l'aide, les USA sont désormais attentifs sur la manière dont cet argent est dépensé. C'est pourquoi dans le cadre du MCA, l'accent est mis sur des pays qui ont des objectifs définis par la Banque Mondiale. Comme le Sénégal est éligible, les USA travaillent actuellement avec le gouvernement pour la finalisation de ces négociations afin qu'en 2005 l'argent puisse commencer à venir pour appuyer les programmes de développement. « 

 

L'AGOA a constitué un des points de discussion de la réunion de Dakar. En effet, du point de vue du Ministre américain, les exportations de textiles en provenance de l'Afrique sùbsaharienne vers les USA, du fait de l'AGOA, ont considérablement augmenté avec un pourcentage de 3,3% par rapport à 2003. Toutefois, selon Zoellick, les pays africains gagneraient à être plus compétitifs dans cette filière des textiles en raison de l'élimination définitive à partir de 2005 des quotas avec la caducité imminente de l'Accord sur les textiles et les vêtements. 

 

La loi sur la croissance et les opportunités en Afrique plus connue sous son acronyme AGOA est promulguée il y'a quatre ans et offre aux pays africains qui en sont bénéficiaires l'accès en franchise de douanes et sans contingent au marché américain. En 2003, les exportations des pays africains au titre de l'AGOA vers les USA ont augmenté de 55%. Trente sept pays parmi lesquels ceux qui ont été visités par le représentant américain, sont déjà bénéficiaires de ce programme. 

 

Quant au MCA, c'est un vaste projet d'aide aux pays en développement auprès d'une agence américaine la Millenium Challenge Corporation. Cette dernière exige entre autres conditions des pays bénéficiaires, qu'ils libéralisent leurs économies et qu'ils facilitent l'accès de leurs marchés aux investisseurs étrangers. Elle réclame par ailleurs de ces pays qu'ils mettent en œuvre des réformes politiques dans le sens de la démocratisation. C'est au cours d'un discours prononcé par le président des USA , Georges Bush , à Monterrey au Mexique, le 22 mars 2002 que la création de celle nouvelle agence a été décidée. 

 

Sources : Notes ENDA 

 

Négociations post-juillet 2004 : Les négociateurs africains auprès de l’OMC examinent l’Accord-Cadre du 1er août et adoptent leur feuille de route à Tunis

 

 

Des négociateurs africains basés à Genève, des officiels, des universitaires et des représentants d'organismes régionaux et internationaux se sont réunis du 25 au 26 novembre, à Gammarth, en Tunisie, pour discuter des principales questions techniques et stratégiques relatives à l'Accord-Cadre adopté par les Membres de l'OMC le 1er août 2004. 

 

La réunion était organisée conjointement par la Commission Économique des Nations Unies pour l'Afrique (CEA), le PNUD, la BAD et l'Union Africaine. Elle avait pour objectif d'aider les pays africains à développer et à affiner leurs positions dans les négociations futures dans le cadre de l'agenda de Doha et devait aussi identifier les enjeux les plus importants pour ces pays dans le cadre des négociations sur les questions de l'agriculture, de l'accès aux marchés pour les produits non agricoles, les services, la facilitation des échanges et les questions de développement. 

 

Cette réunion de haut niveau a été précédée d'une rencontre des experts, les 23 et 24 novembre, qui se sont penchés entre autres, sur les principales propositions du Cycle de Doha et leurs incidences pour les exportations de l'Afrique. Ils ont également débattu des aspects techniques des formules proposées dans les négociations sur l'agriculture et l'accès au marché pour les produits non agricoles ainsi que des obstacles non tarifaires au commerce. 

 

Après avoir rappelé l'engagement des africains à rester impliquer activement dans négociations du cycle de Doha, qui consacre un engagement politique sans précédent en faveur des préoccupations de développement des pays du sud, les participants à la réunion de Tunis ont lancé un appel à la cohésion et à la solidarité à la fois au niveau politique et technique entre le groupe africain et les groupes de pays en développement. Ainsi, en perspective de la sixième conférence ministérielle, des domaines ont été identifiés qui nécessitent « une recherche approfondie et conjointe « de la part des universitaires, des organisations régionales et internationales etc. 

 

Agriculture

 

De l'avis de nombreux représentants africains, le cadre de travail sur l'agriculture contenu dans l'accord-cadre du 1er août laisse en suspens beaucoup de questions d'intérêts pour l'Afrique. Si ces questions sont ajoutés aux contraintes qui vont découler  de  l' introduction  de  nouveaux  éléments  tels  que    « la nouvelle boite 

bleue «, les « produits sensibles «, les « produits spéciaux et les mécanismes de sauvegarde spéciale «, la formule étagée etc., on peut aisément comprendre les difficultés auxquelles les pays africains devraient faire face dans la phase de négociation des modalités. Les participants ont ainsi identifié les questions essentielles sur l'agriculture pour essayer d'y proposer des positions communes. 

 

L'accès aux marchés

 

Se préparant déjà à la phase de modalités, les pays africains envisagent l'élaboration d'une proposition qui devrait intégrer à la fois la formule, les produits sensibles, les produits spéciaux et les mécanismes spéciaux de sauvegarde qui correspondent le mieux aux intérêts de l'Afrique. Le but de cette proposition devrait être d'élaborer plusieurs options auxquelles les négociateurs pourraient se référer dans la phase des modalités, ce d'autant plus que l'accord-cadre du 1er août est resté imprécis sur les paramètres de la formule étagée proposée pour les réductions tarifaires. 

 

La démarche qui à l'heure actuelle semble satisfaire les pays africains est, comme le montre certaines études, de « proposer une formule comportant un élément fort de traitement spécial et différencié opérationnel et substantiel, tout en se conformant à l'accord-cadre sur l'application d'une formule étagée «. 

 

Sur la question de la conversion des tarifs spécifiques en tarifs ad valorem, les négociateurs africains préconisent de chercher la meilleure méthode pour calculer les équivalents ad valorem (AVE) à intégrer dans les formules étagées de réduction tarifaire. C'est pourquoi l'option dégagée est de partir de plusieurs scénarios élaborées à partir de plusieurs méthodes de calculs. 

 

Ils ont en outre abordé la questions de préférences commerciales et montré leur importance sur les économies des pays africains avant de demander que les préférences en place soient sauvegardées et que des études soient menées pour évaluer l'impact de l'accès aux marchés sans restriction pour les exportation africaines dans les pays développés. 

 

Soutien interne et subventions à l'exportation

 

Sur ces deux questions, la démarche des négociateurs africains semble être de s'inscrire dans une posture offensive en proposant pour le premier sujet une période de référence appropriée dans le contexte des engagements de réduction et pour le deuxième une date pertinente qui tienne compte des intérêts des pays africains. 

 

Si la fin toute prochaine des subventions à l'exportation est désormais admise à l'OMC, sa date exacte fera en effet l'objet de vives négociations qui, pour les africains, devrait tenir compte des intérêts des exportateurs africains qui en tireraient avantage et des nombreux autres, importateurs nets de produits alimentaires, qui devraient rencontrer des difficultés. 

 

Coton

 

Le paquet de juillet ne précise pas si les subventions reçues par les producteurs, en particulier ceux des Etats-Unis, seront « supprimées « totalement ou seulement « réduites «, ni quand cela pourrait se faire. Les pays africains devraient donc faire des propositions concrètes à la fois sur les modalités, les délais et les autres questions liées au coton. 

 

Accès aux marchés pour les produits non agricoles

 

L'accord-cadre a repris l'annexe B du texte de Derbez, sur lequel les pays en développement avaient émis de nombreuses réserves, en y ajoutant simplement le paragraphe 1 qui visait à donner l'opportunité de tenir des « négociations supplémentaires « sur les détails d'un nombre important d'éléments à savoir la formule à appliquer, le traitement des tarifs non consolidés, la marge de flexibilité pour les pays en développement, la question relative à la participation des composantes des tarifs sectoriels et la questions des préférences. Dans tous les cas de figure, les africains ont souligné l'importance de disposer d'une marge de manœuvre suffisante pour consolider leur processus d'industrialisation, de bénéficier aussi d'une traitement spécial et différencié, ainsi qu'une non-réciprocité totale quelle que soit la formule adoptée dans la phase des modalités.

 

 

Services

 

Les inquiétudes dans ce domaine portent sur le très petit nombre de pays africains ayant été capable de faire des offres. Les participants ont reconnu la faiblesse du secteur des services sur le continent ainsi que les contraintes des pays dans les négociations sur les services à l'OMC du fait de la dualité entre des aspects sectoriels et des modes d'offres. S'il est convenu que les pays africains doivent développer leurs secteurs des services, les offres à faire dans le cadre des négociations doivent être assorties de conditions afin de garantir que l'ouverture ne bénéficiera pas seulement de quelques entreprises étrangères qui viendront investir sur le continent. 

 

La facilitation des échanges

 

Même si au titre de l'accord-cadre du 1er août les membres ont convenus de se lancer dans la facilitation des échanges, les pays africains demandent encore une clarification de certaines questions telles que le lien entre les contraintes en en ressources humaines et financières et les obstacles techniques au commerce, les procédures de certifîcation etc. Les négociations sur la facilitation des échanges ne devraient pas donc se limiter seulement à la question des procédures douanières mais doit englober des aspects plus larges qui vont jusqu'aux infrastructures. Le gouvernement de Tunisie a pris l'engagement d'organiser une conférence ministérielle sur la facilitation des échanges en 2005. 

 

Sources : Passerelles - Nouvelles régionales - Vol. V no 5 Novembre - Décembre 2004 - rapport Commission économique pour l'Afrique